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Être témoin de l’Évangile ?

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L’identité que nous recevons en Christ nous appelle à être avant toute chose des êtres capables d’aimer. C’est l’appel de Dieu pour nous. Son amour nous a précédés, nous a révélés à nous-mêmes, nous a donné accès à une nouvelle naissance, spirituelle, radicale, qui fait de nous des vivants, debout, en marche, sans cesse transformés, renouvelés en nos intelligences dirait l’apôtre Paul.

Cet amour de Dieu pour nous est inconditionnel, massif et sans compromis. Et il est indissociable d’une parole de vérité qui nous libère chaque jour un peu plus, de nos erreurs, de nos mensonges, de nos morbidités… de tout ce qui fait entrave à la relation de confiance que Dieu veut vivre avec nous, et de tout ce qui nous éloigne de notre vraie identité, une identité délestée de tous les fardeaux de nos histoires, des accidents de parcours, des conditionnements ou des blessures qui ont entamé nos êtres.

Nous recevons sans cesse la vie par l’Esprit Saint qui nous rencontre et nous habite. Nous sommes appelés à nous comporter comme Christ avec notre prochain et le monde. Il est impossible, inacceptable, de rejeter un prochain parce qu’il ne correspondrait pas à nos attentes, nos critères, une pseudo-morale chrétienne soi-disant pieuse. L’Église aura à se repentir de tous les blessés, les exclus des communautés qui ont été jugés et rejetés. Aimons les êtres pour ce qu’ils sont réellement, des créatures merveilleuses, indépendamment de leurs actes et leurs paroles.

« Il n’importe donc plus que l’on soit juif ou non juif, esclave ou libre, homme ou femme ; en effet, vous êtes tous un dans la communion avec Jésus-Christ. Si vous appartenez au Christ, vous êtes alors les descendants d’Abraham et vous recevrez l’héritage que Dieu a promis. » (Galates 3,28-29 – BFC)

« Je pourrais transmettre des messages reçus de Dieu, posséder toute la connaissance et comprendre tous les mystères, je pourrais avoir la foi capable de déplacer des montagnes, si je n’ai pas d’amour, je ne suis rien. » (1 Corinthiens 13,2 – BFC)

L’appel du chrétien et de l’Église joint deux impératifs qui ne sont praticables que si nous nous soumettons à l’Esprit de Dieu :
- Aimer, d’un amour gratuit et inconditionnel, tout être humain, quelles que soient sa culture, son origine, sa couleur, son niveau de vie, sa sexualité…
- Être acteur de l’œuvre de libération que Christ opère en chacun, en portant courageusement et avec compassion, respect, écoute de Dieu et de l’autre, une parole de vérité qui rapproche les êtres de Dieu et du plan de vie prévu pour eux.

Le débat qui anime l’Église à l’aube d’une décision nationale au sein de l’EPUdF exige une profonde délicatesse envers chacun. Il est bien trop facile à l’ennemi de Dieu d’utiliser ces échanges pour diviser encore davantage l’Église, et blesser et éloigner de Dieu des personnes parfois déjà fragiles. Nous devons témoigner de cet amour qui ne vient pas de nous, à commencer dans notre façon de nous écouter réellement les uns les autres. Laissons-nous réunir et convaincre par le Seigneur lui-même pour bénir vraiment.

« Je vous en supplie, donc, moi qui suis prisonnier parce que je sers le Seigneur : vous que Dieu a appelés, conduisez-vous d’une façon digne de cet appel. Soyez toujours humbles, doux et patients. Supportez-vous les uns les autres avec amour. Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit Saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. » (Éphésiens 4,1-3 – BFC)

Si nous voulons être cohérents et apporter un témoignage positif pour le monde, nous ne pouvons pas participer à toute forme de stigmatisation : qu’il s’agisse d’étiqueter le voisin théologique qui ne pense pas comme nous, ou de montrer du doigt des personnes pour leur engagement de vie avec une personne de même sexe.

Aimer est difficile et demande le courage de bénir. Ce n’est pas témoigner d’une parole d’amour pour notre prochain que de dire « Oui » à ce qui n’est pas bon pour lui. Dieu nous a bénis en nous donnant la Loi dans l’Ancien Testament, une Loi accomplie et clairement impraticable pour l’homme telle que revisitée par les enseignements du Christ. Cette Loi de Dieu est un cadre indispensable à la liberté de l’homme. En nous la donnant, Dieu nous bénit plus que nous ne pouvons le recevoir. La Loi est bonne. Avec Christ, nous sommes acculés à être dépendants de Dieu pour la pratiquer, et c’est là la meilleure chose qui pouvait arriver à l’homme tellement rebelle et changeant, toujours tenté de sortir de la relation qui le lie à Dieu et qui pourtant est la seule source de vie et de bonheur pour lui.

Je crois que Dieu nous a créés comme des êtres relationnels et que nous ne pouvons être vraiment vivants sans vivre cette relation avec Dieu et avec les autres. C’est dans l’altérité et la complémentarité d’une relation homme-femme que le couple formé est image de Dieu, formant ainsi un micro-monde à lui tout seul, une entité complète, capable de donner à son tour la vie. Il y a beaucoup de façons de ne pas former cette entité à l’image de Dieu dans un parcours de vie humaine. Et cela aussi au sein d’un couple hétérosexuel qui ne découlerait pas de la volonté de Dieu, ou dans un célibat qui serait le fruit d’un parcours difficile avec le sexe opposé plutôt qu’une réponse à un appel précis du Seigneur, par exemple.

La Bible est un long récit de relations dysfonctionnelles entre les humains eux-mêmes et entre les humains et Dieu. Dieu poursuit l’humain pour le bénir toujours encore. Mais si ces types relationnels présentés dans la Bible disent quelque chose, c’est bien que l’homme est pécheur et qu’il a besoin de Dieu pour être droit, au sens d’une croissance et d’une posture bonne pour lui qui le relie à son créateur. En revanche, ils ne présentent pas tous des modèles relationnels que Dieu agréerait. Ce qui définit ce qui est bon pour l’homme dans la Bible, ce n’est pas les nombreux manquements humains qui se répètent sans cesse, mais la Loi et la Grâce de Dieu joints ensemble.

Ainsi, aujourd’hui, toute personne doit être accueillie dans la communauté sans avoir à se sentir condamnée, méprisée, traitée différemment parce qu’elle partagerait sa vie avec une personne de même sexe. Elle doit être aimée de la même façon que toute autre personne. Il est d’ailleurs important de réaliser que les Églises renvoient rarement les personnes à leurs propres péchés quand il s’agit de tempérament colérique, d’avarice ou de penchant à être dans la séduction avec les autres… Pourtant, nous n’avons pas à juger mais à discerner. Le juge, c’est Dieu. Laissons-lui sa place. Quand lui juge, il amène à la lumière, il guérit, il restaure. Quand nous jugeons, nous blessons, nous rejetons. En revanche, nous avons à discerner. Discerner le bien du mal, non au sens moral de ces termes, mais au sens de voie vers la vie ou vers la mort. Nous devons comprendre ce qui amène à la vie, pour nous-même et pour notre prochain. Et avoir le courage de porter cette parole de vie.

« Car nous n’avons pas à lutter contre des êtres humains, mais contre les puissances spirituelles mauvaises du monde céleste, les autorités, les pouvoirs et les maîtres de ce monde obscur. » (Ephésiens 6,12 – BFC)

Nous vivons à l’ère de la confusion. Nous ne savons plus ce qui est bon pour nous et ce qui est mauvais. Les apparences sont trompeuses, et les conceptions de l’amour et du respect franchement biaisées. En tant que chrétiens, si nous sommes convaincus que la seule voie qui mène à la vie est celle de Jésus-Christ, de la Bonne nouvelle de son amour infini pour nous, lui qui a été jusqu’à se sacrifier pour nous sauver, alors par respect et par amour véritable pour nos prochains, ayons le courage de porter cette parole difficile certes, mais qui seule sauve véritablement.
Cette parole allie l’amour inconditionnel à la Loi qui libère : ce n’est pas une grâce bon marché que nous offre l’Évangile, mais une grâce qui appelle à tout laisser pour suivre le Christ, à se repentir de nos péchés, à entrer dans l’obéissance à la volonté de Dieu, à chercher sans relâche sa voix, sa vision, à se laisser modeler par lui selon sa Loi qui est bonne pour nous, même quand elle est à contre-courant avec la pensée du monde, et c’est d’ailleurs toujours le cas, « mon Royaume n’est pas de ce monde », nous dit Jésus en Jean 18,36.

« Frères, puisque Dieu a ainsi manifesté sa bonté pour nous, je vous exhorte à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, réservé à Dieu et qui lui est agréable. C’est là le véritable culte que vous lui devez. Ne vous conformez pas aux habitudes de ce monde, mais laissez Dieu vous transformer et vous donner une intelligence nouvelle. Vous pourrez alors discerner ce que Dieu veut : ce qui est bien, ce qui lui est agréable et ce qui est parfait. » (Romains 12, 1-2 – BFC)

« L’amour est patient, l’amour est serviable, il n’est pas envieux ; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne médite pas le mal, il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ; il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. » (1 Corinthiens 13, 4-7 – Colombe)

Léa Worms
étudiante en théologie