La grâce de Dieu n’a pas le même sens lorsque l’homme est vu face à un créateur qui l’appelle à le reconnaître, ou lorsqu’elle est un simple accueil bienveillant de l’homme, qui se voit comme le fondement de lui-même.
E. Perrier
La grâce de Dieu n’a pas le même sens lorsque l’homme est vu face à un créateur qui l’appelle à le reconnaître, ou lorsqu’elle est un simple accueil bienveillant de l’homme, qui se voit comme le fondement de lui-même.
E. Perrier
Par Gilles Boucomont, pasteur de l’Eglise protestante unie du Marais, quartier gay de Paris
Dans un texte datant de 2012, le conseil presbytéral de l’Eglise protestante unie du Marais avait pris position pour un moratoire sur la question d’une évolution dans l’Eglise vers la bénédiction de couples homosexuels. A l’époque du débat civil sur le mariage de couples de même sexe, il avait sollicité que soient profondément révisées les lois sur le PACS, pour plus de justice sociale, mais que pour l’Eglise réformée soit maintenu le statu quo de 2004.
Pour autant un pasteur leader de la cause LGBT reconnaissait récemment que dans la sphère luthéro-réformée, cette même paroisse était presque la seule à pouvoir prétendre aux critères de l’inclusivité :
- tout être humain à la même valeur, quel que soit son sexe,
- tout être humain à la même valeur, quel que soit son orientation sexuelle,
- tout être humain est accueilli à l’église comme il est, et peut repartir changé par l’Évangile,
- l’identité sexuelle n’est pas le tout de l’identité,
- l’amour de Dieu est donné inconditionnellement à chacun,
- l’amour de Dieu conduit chacun à la repentance, pour une vie sanctifiée,
- chaque personne peut / doit être accompagnée personnellement,
- l’ostracisation d’un public spécifique dans l’Église est une abomination,
- l’homophobie n’est pas compatible avec la foi chrétienne.
Comment se peut-il qu’une paroisse opposée à la bénédiction d’homosexuels soit la paroisse qui pratique pour tant de personnes un accompagnement spirituel large et qui, de fait, se retrouve à bénir un nombre particulièrement important de personnes dites homosexuelles ?
Clarifier l’anthropologie
Nous l’avons développé ailleurs, mais une des bases de la pastorale locale de cette Eglise consiste à dénoncer un clivage admis de tous, et qui se veut descriptif au niveau comportemental, mais qui produit des effets mensongers, incompatibles avec les anthropologies bibliques. Il s’agit du clivage homosexuel/hétérosexuel.
Normaliser « l’hétérosexualité » comme un summum du projet de Dieu dans les Ecritures bibliques est un mensonge, car le projet de Dieu n’est pas de faire de nous des hétérosexuels, mais des personnes qui vont être complétées par UNE seule et unique personne, du sexe opposé.
Le texte qui fonde l’humanité sexuée (Genèse 1:27) en une seule séquence créationnelle va insister sur le fait que cette complémentarité homme-femme fait de l’humain une vraie image de Dieu. Dans le projet divin qui précédait, il s’agissait que l’humain soit créé non seulement « à son image » mais aussi « à sa ressemblance ». Or, lorsque l’humain mâle et femelle est créé, Dieu dit qu’il l’est à son image. Exit la ressemblance. Le but de la vie humaine est donc d’adjoindre la ressemblance à l’image. C’est très certainement le lieu que la tradition chrétienne appelle la sanctification : se conformer à l’image du Dieu vivant. C’est dans ce lieu-là que nous développons localement l’accompagnement spirituel : donner à chacun la possibilité de ressembler à Christ. « Vous tous, qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. » (Galates 3:27).
A juste titre, les théologiens LGBT rappellent que le deuxième texte créationnel fonde l’humanité sexuée dans un second temps. L’humain, non sexué, est créé d’abord. La sexualité n’est donc pas une identité première. C’est dans un second temps que l’humain est dissocié par l’opération de la côte d’un Adam qui est « humanité » et non « Monsieur Adam ». De cette opération naît la double présence de l’homme (ish) et de la femme (ishah), qui aboutit au cri d’amour de Monsieur : « Voici, elle est l’os de mes os et la chair de ma chair » (Genèse 2:23). C’est surtout la ressemblance et ce que les philosophes contemporains appellent la « mêmeté » qui est mise en valeur par ce texte. Ils sont qualitativement identiques — c’est révolutionnaire. Et pourtant, a contrario de ce qu’affirment les théologiens LGBT, de l’altérité véritable advient (un « ah » en plus à la fin de « ish ») qui permet la Joie d’une identité désormais relationnelle pour l’humain sexué.
Il n’y a ni homosexuels ni hétérosexuels
Le projet de Dieu est donc que l’être humain mâle, ou l’être humain femelle, devienne pleinement humain en trouvant la moitié de lui-même. Il s’agit juste de trouver la personne adéquate, qui est celle qui me fera advenir à ma propre identité, à mon moi véritable. L’enjeu n’est pas copulatoire, car sinon Adam se serait satisfait de l’un ou l’autre des animaux qui avaient précédemment défilé devant lui à la queue-leu-leu. Il s’agit bien de trouver un être unique. L’enjeu n’est même pas de trouver, pour moi qui suis un homme, des femmes ou une femme qui me plaisent, avec qui cela fonctionne, mais de trouver la femme unique qui est ma moitié, et qui me permet de ne plus croire que je suis un être humain complet. Ils étaient deux et ils forment une seule chair, « un seul être » (Genèse 2:24).
Il y a donc un mensonge à dire que le projet de Dieu est de promouvoir l’hétérosexualité.
Car le terme hétérosexualité induit une disponibilité de ma personne (puisque je suis un homme) pour toutes les femmes ! Alors que je suis destiné à une femme, la mienne, pour que je sois son homme. « La femme n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est le mari ; et pareillement, le mari n’a pas autorité sur son propre corps, mais c’est la femme. » (1 Corinthiens 7:4). Tout simplement parce qu’ils sont une seule chair ; une seule personne ou un seul être comme proposeront d’autres traductions.
S’il y a un mensonge à parler donc d’hétérosexualité, il y a un mensonge identique à parler d’homosexualité. Il y a seulement des gens qui se croient attirés par des personnes de même sexe, des gens qui pensent avoir toujours été faits pour des personnes de même sexe, des gens qui pensent s’être découverts progressivement faits pour des personnes de même sexe. Mais c’est une identité de construction, posée telle un habit sur l’identité humaine toute autre prévue par le Dieu de Jésus-Christ. Une identité falsifié comme s’en fabriquent les soi-disant hétérosexuels.
La Bible est incroyablement riche en exemples pour nous montrer des façons d’être hétérosexuel sur un mode dysfonctionnel !
C’est notre société qui nous impose de nous installer dans une identité à ce point fixée et labellisée par des appellations fallacieuses. Aucune personne N’EST homosexuelle pas plus que qui que ce soit ne serait hétérosexuel selon la définition que nous en avons donnée. Notre être tel que Dieu l’a programmé est qu’on soit ou bien célibataire, ou bien dûment uni à la personne de l’autre sexe qui fera pour toujours notre joie.
Mais cette manie de poser des termes sur notre être et notre identité plutôt que de ne décrire que des comportements nous empêchent de voir seulement :
- des hommes qui sont attirés par plusieurs femmes plutôt que des « Dom Juan »,
- des femmes qui sont attirées par plusieurs hommes plutôt que des « séductrices »,
- des hommes qui sont attirés par des adolescentes plutôt que des « pédophiles »,
- des femmes qui sont attirées par des très jeunes hommes plutôt que des « cougars »,
- des hommes qui sont attirés par des hommes plutôt que des « gays »,
- des femmes qui sont attirées par des femmes plutôt que des « lesbiennes »…
Non ! rien de tout cela ! Personne N’EST cela !
Ces paroles, prononcées sur des créatures de Dieu, sont des malédictions !
Il y a seulement des gens qui ont du mal à rentrer dans le projet de Dieu et qui se focalisent sur ce que les psychologues appellent « de mauvais objets ». Que des non-chrétiens le fassent, cela ne nous pose aucun problème. C’est la loi du monde. Mais pour nous qui sommes chrétiens c’est fini, ce n’est plus possible.
Bénir ceux qui se croient encore homosexuels
« Ceux qui sont à Jésus-Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. » (Galates 5:24). Le chrétien a décidé d’entrer pleinement dans le projet de vie scripturaire : une conjugalité d’alliance. Je ne parle même pas de « mariage », qui est bien une institution humaine. C’est un contrat parmi d’autres, comme le PACS, comme le certificat de concubinage. Je parle de l’alliance de mariage et pas du contrat de mariage. Les contrats ont été fondés par le Serpent de Genèse 3 et sont gérés par Mammon. Les contrats sont essentiellement composés de clauses qui modélisent la rupture, l’infidélité, la sortie du projet. L’alliance est une œuvre de Dieu lui-même et non pas une association d’humains contractuelle vaguement exposée au regard de Dieu. Le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu de l’alliance. Le Serpent est le maître des contrats. L’Église bénit donc ce que Dieu bénit.
Le rôle bénissant de l’Église est donc de prononcer la liberté qui jaillit de la crucifixion de la chair avec ses passions et ses désirs. L’Église bénit des pécheurs et ne cautionne pas leur péché. Elle bénit des pécheurs qui sont prêts à se repentir et à entrer dans la sanctification. Elle bénit des pécheurs pour leur permettre, parfois APRÈS avoir été bénis, de reconnaître leur péché.
« Je confesse comme péché d’avoir considéré que j’étais hétérosexuel, et qu’incidemment, toutes les femmes de la terre étaient disponibles pour moi. »
Le péché, ce sont toutes ces identités artificielles dont s’est revêtue la créature de Dieu. Voilà pourquoi nous bénissons ceux qui se proclament homosexuels.
Nous les bénissons pour qu’ils quittent l’Egypte intérieure d’une définition mensongère d’eux-mêmes. Et nous les bénissons, à cet égard, exactement de la même façon que nous bénissons ceux qui pensent que leur identité est dans leur travail, ou dans leur nombre de followers sur Twitter. Bref, nous bénissons individuellement des humains qui ont endossé des vêtements sordides plutôt que de revêtir leur identité véritable.
« Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ, et n’ayez pas soin de la chair pour en satisfaire les convoitises. » (Romains 13:14)
C’est donc pour cette même raison que nous ne pouvons pas bénir un couple homosexuel, pas plus que nous ne prononcerions une bénédiction sur un couple homme-femme dûment passé par la mairie, s’il nous semble que ce couple est dans un mode relationnel dissymétrique et dangereux, de type père-fille plutôt que mari-femme, par exemple.
Nous bénissons des se-disant « homosexuels » individuellement :
- certains qui vivent une vie avec un partenaire dans la fidélité et depuis longtemps,
- certains qui sont dans un badinage flottant,
- certains qui s’astreignent à l’abstinence,
- certains qui souffrent bruyamment, victimes d’homophobie,
- certains qui souffrent en silence, insatisfaits par leur orientation…
Nous les bénissons parce que nous revenons, nous aussi, de loin. Parce que nous sommes nous-mêmes des grâciés, des fils et des filles de la bénédiction, qui sont, eux-aussi passés par le crible de la justice de Dieu et de la repentance, qui ont du se laisser « dépouiller du vieil homme et de ses œuvres » (Colossiens 3:9). Et que la clémence du Dieu vivant pour nous a été telle que nous serons les dernier à juger d’autres pécheurs comme si leur péché à eux était plus infamant que le nôtre.
« Tous ont péché et tous sont privés de la gloire de Dieu. Mais dans sa bonté, Dieu les rend justes gratuitement par Jésus-Christ, qui les libère du péché. »
Romains 3:23-24
Participation au débat concernant la bénédiction du mariage civil des personnes de même sexe, par le pasteur François Anglade
Dix propositions pour fonder notre résistance – « Il y a au fond des âmes, depuis que Jésus-Christ en a pris l’empire, cette parole plus forte que la puissance de tous les rois : Non possumus. Vous nous demandez de placer notre conscience sous le sceptre d’un dictat : Non possumus »
I) Sept propositions pour la foi :
- Sola Scriptura – L’Eglise réformée de France déclarait en 1938 : « Elle affirme l’autorité souveraine des Saintes Écritures telle que la fonde le témoignage intérieur du Saint-Esprit, et reconnaît en elles la règle de la foi et de la vie »
1) parce que « la bénédiction » nous introduit dans le plan créateur et sauveur de Dieu et nous fait entrer dans la fécondité de l’Alliance, elle ne peut pas être manipulée pour servir nos fins personnelles ; au contraire nous croyons en la puissance subversive et souvent contrariante de la bénédiction (Cf. Ge 49,3 et 4 et Mt 5,11 et 12) ;
2) parce qu’en suivant les Écritures il est possible de définir ce qu’est l’institution du mariage qui crée certes différentes formes de familles selon les époques, mais qui donne comme constante : une alliance contractée entre deux personnes de sexe différents pour former une communauté de respect et d’amour et accueillir, s’ils sont donnés, les enfants qui naîtront ;
3) parce que l’Église, corps du Christ, n’est pas formée de justes, mais de personnes justifiées, non pas de personnes impeccables mais de personnes appelées à devenir des saints ;
4) parce que la Bible dénonce les relations de sexe entre hommes comme une des conséquences du désordre spirituel de l’idolâtrie, (Romains 1:25 (ils) ont adoré et servi la créature au lieu du Créateur, qui est béni éternellement. Amen !)
5) parce que le Nouveau Testament ne stigmatise en particulier aucune forme du péché, la personne homosexuelle a toute sa place dans la vie de la communauté chrétienne en compagnie de tous les autres pécheurs appelés à la sanctification ;
6) parce tout pécheur qui se convertit est appelé à laisser la grâce agir en lui pour être conformé au dessein créateur et sauveur de Dieu ;
7) parce que le mariage ne se définit pas seulement par une alliance, ou seulement par un amour, comme dans le cas d’une union homosexuelle, mais aussi par la différenciation sexuée qui ouvre à la fécondité, le mariage homosexuel n’est pas un mariage au sens où nos pères en la foi nous en ont transmis la définition;
II) Trois propositions de type anthropologique
8) parce que la formation du couple homosexuel engendre la souffrance du couple due à sa stérilité et conduit au désir de l’enfant et finalement au « droit à l’enfant » ;
9) parce que, dans le cas de la famille homoparentale l’engendrement par procréation médicalement assistée ou la gestation pour autrui sont des pratiques qui privent ipso facto (par différence d’avec les accidents de la vie) l’enfant de l’un de ses parents ;
10) parce que la famille homoparentale ne fait pas droit, dans l’intimité familiale, à l’identification différenciée nécessaire à la construction de l’enfant, ce qui est source de carence dans la construction de l’adulte comme nous le rapportent de nombreux témoignages ;
En conséquence :
La bénédiction nuptiale, qui va bien au-delà d’un simple accueil, prononcée sur des unions de personnes de même sexe serait une tromperie !
Il me serait impossible de rester en communion avec une Eglise qui encourage ces bénédictions. Non possumus ! En outre j’affirme, pour l’avoir vérifié, qu’une personne homosexuelle qui se laisse rejoindre par la grâce de Dieu trouvera son identité et la joie de la vie éternelle. (1Co 6,11)
Pasteur François Anglade, DEA en théologie pratique IPT Paris 1993
Dans un article pour l’agence de presse religieuse « Fait Religieux », le pasteur Caroline Bretones pose les limites d’un débat où toute posture devient piégeante, entre le NON qui condamnerait des créatures de Dieu et le OUI qui validerait tout.
http://fait-religieux.com/la-benediction-pour-tous-un-sujet-brulant
L’identité que nous recevons en Christ nous appelle à être avant toute chose des êtres capables d’aimer. C’est l’appel de Dieu pour nous. Son amour nous a précédés, nous a révélés à nous-mêmes, nous a donné accès à une nouvelle naissance, spirituelle, radicale, qui fait de nous des vivants, debout, en marche, sans cesse transformés, renouvelés en nos intelligences dirait l’apôtre Paul.
Cet amour de Dieu pour nous est inconditionnel, massif et sans compromis. Et il est indissociable d’une parole de vérité qui nous libère chaque jour un peu plus, de nos erreurs, de nos mensonges, de nos morbidités… de tout ce qui fait entrave à la relation de confiance que Dieu veut vivre avec nous, et de tout ce qui nous éloigne de notre vraie identité, une identité délestée de tous les fardeaux de nos histoires, des accidents de parcours, des conditionnements ou des blessures qui ont entamé nos êtres.
Nous recevons sans cesse la vie par l’Esprit Saint qui nous rencontre et nous habite. Nous sommes appelés à nous comporter comme Christ avec notre prochain et le monde. Il est impossible, inacceptable, de rejeter un prochain parce qu’il ne correspondrait pas à nos attentes, nos critères, une pseudo-morale chrétienne soi-disant pieuse. L’Église aura à se repentir de tous les blessés, les exclus des communautés qui ont été jugés et rejetés. Aimons les êtres pour ce qu’ils sont réellement, des créatures merveilleuses, indépendamment de leurs actes et leurs paroles.
« Il n’importe donc plus que l’on soit juif ou non juif, esclave ou libre, homme ou femme ; en effet, vous êtes tous un dans la communion avec Jésus-Christ. Si vous appartenez au Christ, vous êtes alors les descendants d’Abraham et vous recevrez l’héritage que Dieu a promis. » (Galates 3,28-29 – BFC)
« Je pourrais transmettre des messages reçus de Dieu, posséder toute la connaissance et comprendre tous les mystères, je pourrais avoir la foi capable de déplacer des montagnes, si je n’ai pas d’amour, je ne suis rien. » (1 Corinthiens 13,2 – BFC)
L’appel du chrétien et de l’Église joint deux impératifs qui ne sont praticables que si nous nous soumettons à l’Esprit de Dieu :
- Aimer, d’un amour gratuit et inconditionnel, tout être humain, quelles que soient sa culture, son origine, sa couleur, son niveau de vie, sa sexualité…
- Être acteur de l’œuvre de libération que Christ opère en chacun, en portant courageusement et avec compassion, respect, écoute de Dieu et de l’autre, une parole de vérité qui rapproche les êtres de Dieu et du plan de vie prévu pour eux.
Le débat qui anime l’Église à l’aube d’une décision nationale au sein de l’EPUdF exige une profonde délicatesse envers chacun. Il est bien trop facile à l’ennemi de Dieu d’utiliser ces échanges pour diviser encore davantage l’Église, et blesser et éloigner de Dieu des personnes parfois déjà fragiles. Nous devons témoigner de cet amour qui ne vient pas de nous, à commencer dans notre façon de nous écouter réellement les uns les autres. Laissons-nous réunir et convaincre par le Seigneur lui-même pour bénir vraiment.
« Je vous en supplie, donc, moi qui suis prisonnier parce que je sers le Seigneur : vous que Dieu a appelés, conduisez-vous d’une façon digne de cet appel. Soyez toujours humbles, doux et patients. Supportez-vous les uns les autres avec amour. Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit Saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. » (Éphésiens 4,1-3 – BFC)
Si nous voulons être cohérents et apporter un témoignage positif pour le monde, nous ne pouvons pas participer à toute forme de stigmatisation : qu’il s’agisse d’étiqueter le voisin théologique qui ne pense pas comme nous, ou de montrer du doigt des personnes pour leur engagement de vie avec une personne de même sexe.
Aimer est difficile et demande le courage de bénir. Ce n’est pas témoigner d’une parole d’amour pour notre prochain que de dire « Oui » à ce qui n’est pas bon pour lui. Dieu nous a bénis en nous donnant la Loi dans l’Ancien Testament, une Loi accomplie et clairement impraticable pour l’homme telle que revisitée par les enseignements du Christ. Cette Loi de Dieu est un cadre indispensable à la liberté de l’homme. En nous la donnant, Dieu nous bénit plus que nous ne pouvons le recevoir. La Loi est bonne. Avec Christ, nous sommes acculés à être dépendants de Dieu pour la pratiquer, et c’est là la meilleure chose qui pouvait arriver à l’homme tellement rebelle et changeant, toujours tenté de sortir de la relation qui le lie à Dieu et qui pourtant est la seule source de vie et de bonheur pour lui.
Je crois que Dieu nous a créés comme des êtres relationnels et que nous ne pouvons être vraiment vivants sans vivre cette relation avec Dieu et avec les autres. C’est dans l’altérité et la complémentarité d’une relation homme-femme que le couple formé est image de Dieu, formant ainsi un micro-monde à lui tout seul, une entité complète, capable de donner à son tour la vie. Il y a beaucoup de façons de ne pas former cette entité à l’image de Dieu dans un parcours de vie humaine. Et cela aussi au sein d’un couple hétérosexuel qui ne découlerait pas de la volonté de Dieu, ou dans un célibat qui serait le fruit d’un parcours difficile avec le sexe opposé plutôt qu’une réponse à un appel précis du Seigneur, par exemple.
La Bible est un long récit de relations dysfonctionnelles entre les humains eux-mêmes et entre les humains et Dieu. Dieu poursuit l’humain pour le bénir toujours encore. Mais si ces types relationnels présentés dans la Bible disent quelque chose, c’est bien que l’homme est pécheur et qu’il a besoin de Dieu pour être droit, au sens d’une croissance et d’une posture bonne pour lui qui le relie à son créateur. En revanche, ils ne présentent pas tous des modèles relationnels que Dieu agréerait. Ce qui définit ce qui est bon pour l’homme dans la Bible, ce n’est pas les nombreux manquements humains qui se répètent sans cesse, mais la Loi et la Grâce de Dieu joints ensemble.
Ainsi, aujourd’hui, toute personne doit être accueillie dans la communauté sans avoir à se sentir condamnée, méprisée, traitée différemment parce qu’elle partagerait sa vie avec une personne de même sexe. Elle doit être aimée de la même façon que toute autre personne. Il est d’ailleurs important de réaliser que les Églises renvoient rarement les personnes à leurs propres péchés quand il s’agit de tempérament colérique, d’avarice ou de penchant à être dans la séduction avec les autres… Pourtant, nous n’avons pas à juger mais à discerner. Le juge, c’est Dieu. Laissons-lui sa place. Quand lui juge, il amène à la lumière, il guérit, il restaure. Quand nous jugeons, nous blessons, nous rejetons. En revanche, nous avons à discerner. Discerner le bien du mal, non au sens moral de ces termes, mais au sens de voie vers la vie ou vers la mort. Nous devons comprendre ce qui amène à la vie, pour nous-même et pour notre prochain. Et avoir le courage de porter cette parole de vie.
« Car nous n’avons pas à lutter contre des êtres humains, mais contre les puissances spirituelles mauvaises du monde céleste, les autorités, les pouvoirs et les maîtres de ce monde obscur. » (Ephésiens 6,12 – BFC)
Nous vivons à l’ère de la confusion. Nous ne savons plus ce qui est bon pour nous et ce qui est mauvais. Les apparences sont trompeuses, et les conceptions de l’amour et du respect franchement biaisées. En tant que chrétiens, si nous sommes convaincus que la seule voie qui mène à la vie est celle de Jésus-Christ, de la Bonne nouvelle de son amour infini pour nous, lui qui a été jusqu’à se sacrifier pour nous sauver, alors par respect et par amour véritable pour nos prochains, ayons le courage de porter cette parole difficile certes, mais qui seule sauve véritablement.
Cette parole allie l’amour inconditionnel à la Loi qui libère : ce n’est pas une grâce bon marché que nous offre l’Évangile, mais une grâce qui appelle à tout laisser pour suivre le Christ, à se repentir de nos péchés, à entrer dans l’obéissance à la volonté de Dieu, à chercher sans relâche sa voix, sa vision, à se laisser modeler par lui selon sa Loi qui est bonne pour nous, même quand elle est à contre-courant avec la pensée du monde, et c’est d’ailleurs toujours le cas, « mon Royaume n’est pas de ce monde », nous dit Jésus en Jean 18,36.
« Frères, puisque Dieu a ainsi manifesté sa bonté pour nous, je vous exhorte à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, réservé à Dieu et qui lui est agréable. C’est là le véritable culte que vous lui devez. Ne vous conformez pas aux habitudes de ce monde, mais laissez Dieu vous transformer et vous donner une intelligence nouvelle. Vous pourrez alors discerner ce que Dieu veut : ce qui est bien, ce qui lui est agréable et ce qui est parfait. » (Romains 12, 1-2 – BFC)
« L’amour est patient, l’amour est serviable, il n’est pas envieux ; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne médite pas le mal, il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ; il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. » (1 Corinthiens 13, 4-7 – Colombe)
Léa Worms
étudiante en théologie